Baromètre Maison&Objet #9. Six mois après sa dernière prise de température, Maison&Objet examine à nouveau le secteur de la décoration, du design et de l’art de vivre, avec à la clé un véritable bilan de santé de la profession, auquel près d’un millier de distributeurs, de prescripteurs et de marques ont participé. Tour d’horizon.
Pour le 2ème baromètre de l’année, Maison&Objet a recueilli, en octobre, le témoignage de professionnels du secteur sur le climat actuel des affaires et leurs perspectives. Globalement, la situation actuelle est complexe pour les acteurs du marché.
36% des professionnels interrogés regrettent le repli de leur volume d’affaires sur les six derniers mois. C’est notamment le cas de 40% des distributeurs.
36% des répondants déclarent avoir maintenu leur chiffre d’affaires entre avril et septembre 2024, dont 42% parmi les porteurs de projets d’aménagement (les prescripteurs).
À contrario, 29% des répondants se félicitent d’un chiffre d’affaires en hausse sur la période. C’est 4 points de plus par rapport au baromètre publié au printemps dernier. Cette tendance positive concerne particulièrement les marques (35%).
Parmi les distributeurs (boutiques indépendantes, grands magasins et autres revendeurs), les plus affectés sont ceux possédant des points de vente physiques : 39% d’entre eux ont observé une baisse des ventes sur ce canal. La « baisse de fréquentation », les « difficultés à fidéliser les clients » toujours plus volatils ou encore la « concurrence féroce avec l’e-commerce » sont les principaux obstacles qui transparaissent à la lecture de leurs commentaires.
Le tout, sur fond d’inflation, de pouvoir d’achat en berne depuis la période Covid et de contexte économique et géopolitique complexe. La Banque Centrale Européenne, bien que prudente, observe toutefois un ralentissement de l’inflation en zone euro à 1,8% en septembre 2024, taux le plus bas observé depuis avril 2021 (1). Ce qui pourrait, s’il s’ancre dans le temps, tendre vers une amélioration notamment dans les toutes prochaines semaines à l’approche des fêtes de fin d’année. D’après l’étude de Havas Market et Yougov, le budget des Français consacré aux cadeaux de Noël cette année, sera supérieur de 16% par rapport à celui de 2023, soit 261,40€ (2). En Allemagne, EBay estime, dans son rapport sur les achats de Noël 2024, un budget stable par rapport à 2023 : 49 % des consommateurs allemands prévoyant de dépenser autant, voire plus, en cadeaux. (3)
Point rassurant et non des moindres, le retail parvient tout de même à tirer son épingle du jeu. 60% des distributeurs de la communauté de Maison&Objet confient être parvenus à maintenir voire augmenter leur chiffre d’affaires depuis avril 2024 grâce à certaines catégories de produits plus dynamiques. 7 distributeurs sur 10 positionnés sur les accessoires de mode, les fragrances, senteurs et bien-être ou bien les cadeaux, ont connu au semestre dernier une hausse des ventes en volume ou un niveau équivalent sur ces catégories, par rapport à la même période l’an passé.
Si 26% des distributeurs, toutes catégories confondues, évoquent des stocks actuels élevés, dans l’ensemble, ces derniers sont jugés stables pour 56% des revendeurs. Signe de bonne gestion et de bonne rotation des assortiments. Si bien que 95% des distributeurs envisagent de passer des commandes auprès de leurs fournisseurs d’octobre 2024 à mars 2025. Ils sont 58% à prévoir des commandes équivalentes ou supérieures par rapport à celles passées à la même période l’an dernier.
Côtés prescripteurs, 5 nouveaux chantiers ont, en moyenne, été signés entre avril et septembre 2024.
Sur les six derniers mois, 28% des professionnels de l’aménagement ont confié avoir vu leur nombre de projets, dans le résidentiel, progresser.
Une situation à tempérer en France par le coup de frein des autorités bancaires dans l’accès au crédit depuis 2023 qui a conduit à une baisse d’activité dans le résidentiel pour 39% des aménageurs français. Un léger desserrement de vis, favorisé par une décrue (nonchalante) des taux d’intérêt, pourrait intervenir sur le marché résidentiel hexagonal.
« Avec une véritable détente attendue au plus tôt fin 2025 », peut-on lire dans la dernière étude Xerfi dédiée au marché français de l’immobilier de logements à horizon 2025. (4)
1 prescripteur sur 2 spécialisé dans le secteur de l’hôtellerie-restauration regrette une réduction de ses projets sur les six derniers mois, par rapport à la même période en 2023. À l’échelle européenne, l’hôtellerie a connu un nombre de faillites inédites l’an dernier, soit quasi deux fois plus élevé que le taux de référence de 2015, d’après Statista, la plateforme en ligne de référencement de données d'instituts, d'études de marché et d’opinion. Pour autant, les investisseurs continuent d’accorder leur confiance au secteur. Avec un volume de transaction immobilière dans l’hôtellerie qui a atteint les 11,6 milliards d’euros au premier semestre 2024 en Europe (+49% sur un an), relève Cushman & Wakefield, leader mondial des services en immobilier d’entreprise. (5)
« Les architectes d’intérieur ont fait face à une situation difficile en 2024 pour des raisons économiques. La baisse de pouvoir d’achat des consommateurs a impacté la demande pour des services tels que l’aménagement intérieur. En tant que designers d’intérieurs, nous devons davantage recourir aux outils digitaux et aux logiciels susceptibles d’améliorer notre efficacité et notre communication auprès des clients. Nous devons également nous appuyer sur la force et la valeur unique de nos compétences humaines, et chercher à les améliorer en permanence. » Commentaire de Lily Dzis, Architecte d’intérieur - Rafael Viñoly Architects, États-Unis
Concernant l’aménagement de magasins, 48% des prescripteurs annoncent avoir eu moins de projets ces six derniers mois. Très certainement en lien avec les difficultés rencontrées par les points de ventes physiques.
Ceux spécialisés dans l’aménagement d’immobilier de bureaux sont presque autant (46%) à avoir connu, eux aussi, une activité en retrait. À noter que depuis le Covid, le secteur a rebattu les cartes et est en pleine réinvention. Les entreprises revoient leur copie en matière de consommation d’espace. Elles misent désormais sur des surfaces plus restreintes, modulables et flexibles pour s’adapter au mieux aux nouvelles façons de travailler qui se développent depuis quatre ans. De nombreux espaces, notamment vacants, devront être réhabilités à l’avenir. De potentielles sources de nouveaux marchés pour les prescripteurs.
Une chose est sûre, ces derniers continueront d’arpenter les allées des salons professionnels. Ils sont 78% à déclarer que ceux-ci sont leurs premières sources d’inspiration.
55% des marques que nous avons interrogées font état de stocks stables, contre 60% il y a tout juste un an. Sur la même période, elles sont 21% à déclarer disposer de stock bas. Lorsqu’elles étaient 15% en octobre 2023.
Dans les six prochains mois, 84% des marques répondantes prévoient de lancer des nouveautés. Une preuve d’un certain optimisme malgré le contexte actuel et les nombreux défis auxquels elles doivent faire face. « Il peut être nécessaire de repenser les gammes de produits pour répondre aux nouvelles attentes des consommateurs, notamment en termes de prix et de fonctionnalité. Explorer des solutions innovantes et des modèles commerciaux alternatifs », estime un professionnel basé en Lettonie.
« La vitesse de copie augmente et s'accélère avec l’IA. Cela impose d'avoir une créativité soutenue et cohérente avec l'esprit de la marque. Cela demande aussi de savoir faire face à une concurrence moins qualitative mais plus présente en Marketing », considère pour sa part cette marque espagnole.
En avril, Maison&Objet avait mis en relief dans son baromètre la grande résilience de sa communauté face aux multiples crises qui se sont succédées ces quatre dernières années. Six mois plus tard, cette capacité du secteur à résister et s’adapter se confirme. Tout en gardant espoir en l’avenir. 82% des professionnels de la communauté de Maison&Objet disent avoir des perspectives positives ou stables quant à leur chiffre d’affaires, pour la période d’octobre 2024 à mars 2025.