Restaurants, cafés, hôtels doivent aujourd’hui être "instagrammables". Mais pour que les hôtes reviennent, il faut jouer sur tous les sens.
Du lobby psychédélique de l’Ibis Styles de Brisbane à l’escalier spectaculaire du So Sofitel de Berlin dont le décor a été confiée à Patricia Urquiola, les hôtels Accor sont hautement “instagrammables”. La petite chaine Jo and Joe lancée il y a deux ans semble même entièrement pensée pour que ses clients millennials, accros à l’application, partagent leurs images. Pour les attirer, il n’y a pas photo, il faut être sur le réseau. Mais pour qu’ils reviennent, ce n’est pas suffisant. « Il faut agir pour être sûrs qu’ils se souviennent du temps qu’ils ont passé chez vous. Et pour cela, il n’y a rien de tel que de réveiller les sens, de stimuler leurs émotions et de créer un élément de surprise », explique Damien Perrot, responsable de la stratégie design du groupe. « Les hôtes se souviendront d’une couette confortable, d’une serviette épaisse douce au toucher, d’un parfum agréable ou enchanteur… Chaque petit détail peut constituer une expérience marquante et mémorable ».
Les mille ballons de verre soufflé qui surplombent le bar aux couleurs douces du 86 Champs-Élysées à Paris déclenchent une irrésistible envie d’utiliser la fonction photo de son smartphone. Mais dans les lieux où les parfums de la maison L’Occitane et les pâtisseries délicates de Pierre Hermé ne sont pas là pour générer l’addiction, la décoratrice Laura Gonzalez sait créer d’autres expériences mémorables. Si ses décors riches en motifs du Relais Christine qu’elle a réinventé font le bonheur de l’instagrameur, le toucher voluptueux des textiles qu’elle affectionne, des velours précieux, participe bien plus encore de l’envie de retourner séjourner dans ce cocon luxueux. L’émotion, la surprise fabriquent des souvenirs et font partie de son travail. Il n’est pas étonnant que la jeune architecte parisienne ait récemment lancé une ligne de bougies dont elle a choisi le dessin et les senteurs, des parfums qui lui tiennent à cœur.
Dans le hors champ de la photo sur Instragram, le grammage de l’éponge du peignoir dans lequel on s’enveloppe, l’impression de fraîcheur du lin lorsque l’on se glisse entre les draps ou encore la sensation subtile d’un verre fin ou d’une porcelaine délicate racontent une autre histoire… et créent l’addiction.
Par Marie Montuir