Future On Stage deuxième édition distingue Sas Minimum, Noppi et Gwilen. Trois jeunes marques dont l’innovation et le design révolutionnaire partent de l’existant. Que présenteront-ils sur le pavillon dédié du salon Maison&Objet Paris de mars 2023 ? Réponse avec les lauréats, initiateurs de trois aventures à très haut potentiel où création égale transformation. Les uns citent Les Mythologies de Roland Barthes, les autres sont plutôt lévi-straussiens. Des théoriciens inspirant à concevoir sans soumettre l’environnement à nos concepts, pour un équilibre retrouvé.
C’est quoi : De l’éco construction esthétique à partir de déchets plastiques.
Pays : France
L’histoire de la marque : Quand quatre étudiants de l’école d’architecture de Versailles travaillent sur un projet de Campus au Kenya, ils se demandent comment faire avec le moins possible. Nous sommes en 2016, les décharges à ciel ouvert sont nombreuses sur le continent africain, le recyclage s’impose. L’expérience étudiante qui vise à utiliser les ressources locales et renouvelables s’ancre dans la réalité grâce à une association puis évolue en entreprise. Elle valorise aujourd’hui une matière première 100% française dans une micro économie circulaire basée en Ile de France. Un modèle social et économique voué à s’étendre en France grâce à des unités de production développées en cohérence avec les enjeux des territoires. L’atelier actuel, à Aubervilliers, restera le centre de recherches de la jeune équipe d’ingénieurs pendant qu’une nouvelle usine verra le jour à Châlons-sur-Saône où sont situés des partenaires sourcing, avant d’autres lieux de développement sur le territoire français.
L’idée innovante : Un matériau vertueux, polyvalent, doté d’un capital créatif fort.
Le produit-phare : Le Pavé®, présenté sous forme de plaques massives de 140 x 90 cm et de 5 à 15 mm d’épaisseur qui se travaille comme du bois tout en étant flexible, résistant à l’eau et aux taches. Il sert de revêtement, mural et sol, de plan de travail, de comptoirs, de plateau de bureau à la fabrication de mobilier ou d’objets. Performant et esthétique, le Pavé® offre l’occasion aux marques (Sonia Rykiel, Adidas ou Veja) de prolonger leur stratégie environnementale dans leur scénographie.
Le coup de buzz : Des sièges pour le Centre Pompidou (visibles à l’étage -1) et pour le comité olympique. La production de 11 000 strapontins pour les JO 2024 dont ceux de la piscine Olympique en partie issus des bouchons apportés par les habitants en partenariat avec l’association TerraVox.
En quoi SAS MINIMUM est-il révolutionnaire ?
Marius Hamelot : Il change la perceptions des déchets. Nos expérimentations contribuent à résoudre la pollution, que ce soit en pleine nature ou dans les océans, tout en réinventant le secteur du bâtiment. Nous réintroduisons le plastique dans un cycle long grâce à un procédé de thermocompression unique – et secret – sans aucune résine ajoutée, 100% recyclable et 100% recyclé.
Que préparez-vous pour le pavillon Future On stage ?
MH : Nous montrerons le Pavé® bien sûr, sous ses différents aspects, réalisé sans mélanger la matière première. En conservant l’histoire du déchet, nous obtenons des broyats qui permettent de jouer sur les styles. Un outil digital monitore l’aléatoire des résidus de l’industrie automobile ou des gaines électriques (broyats noirs), de l’industrie cosmétique (broyats transparents) ou des bouteilles de lait (blancs). À chaque matière, son histoire, son esthétique et ses propriétés. Nous présenterons également notre nouveau produit fabriqué à partir du polystyrène des portes de frigo, pour lequel on cherche encore un nom.
Et après ?
MH : On prépare trois nouveaux matériaux ultra complémentaires en termes de propriétés et d’applications. Ils sont issus de moquette, de semelles de chaussures ou de briques de lait. Objectif 2040 : recycler un million de tonnes de matière par an, nous en sommes à 300, ce qui représente 30 000 mètres carrés de revêtement. Parallèlement, nous testons des solutions biosourcées comme la fibre de roseau, le champignon Mycélium, mais notre priorité reste le plastique et notre volonté de capitaliser sur les ressources existantes pour réinventer de nouvelles formes de matérialité sur des territoires qui leur sont propres.
C’est quoi : Du mobilier modulable qui isole du bruit et de la promiscuité.
Pays : France
L’histoire de la marque : L’idée de travailler sur cette thématique est née en 2019 quand de nouveaux voisins se font entendre à travers les murs, d’Alexandre Guyenne. Il réalise alors l’omniprésence du bruit et de la promiscuité dans la vie citadine. Une gêne qui se fait principalement ressentir autour de trois activités clés du quotidien : la concentration, la détente et le repos. Pour chacun de ces trois usages, il faudrait pouvoir faire apparaître du calme, à la demande et sans perte d’espace. Après la construction du Médipôle de Koutio à Nouméa en Nouvelle-Calédonie puis sept ans dans l’énergie renouvelable maritime, cet ingénieur BTP, s’associe à Gaël Hiétin, designer inspiré par le biomimétisme et la polysensorialité et co-auteur du livre blanc Silence Chantier pour la Société du Grand Paris. Ensemble, ils repensent le mobilier de tous les jours pour créer des sous-espaces personnels déployables, abrités des nuisances sonores et des regards. Ainsi, l’intimité retrouve toute sa place, sans en prendre.
L’idée innovante : Créer de l’intimité modulaire : s’extraire tout en restant présent grâce à des objets déployable
Le produit-phare : Orri, un fauteuil membrane acoustique qui s’ouvre et se maintient comme un origami. On libère ses ailes en tirant sur ses poignées en cuir et nous voilà couverts par une coque protectrice.
Le coup de buzz : Lors de la dernière Paris Design Week Factory, les visiteurs de la Galerie Froissart ont frissonné de bien-être en dépliant les ailettes de l’assise. Les articles dans la presse étrangère affluent, un reel franco-brésilien atteint 2 millions de vues, une journaliste argentine s’enthousiasme d’avoir découvert la « petite perle de la PDW ». Le président du Mobilier national vient témoigner de son intérêt. Autant de signes qu’il existait un vrai besoin, sans réponse satisfaisante jusqu’ici.
En quoi Noppi est-il révolutionnaire ?
Alexandre Guyenne : Notre démarche est de concevoir des cocons d’intimité en repensant les meubles du quotidien pour leur donner la capacité de se transformer en sous-espaces, plus calmes. Dans la densification de nos cités et la mutation des usages, dans nos espaces hybrides et partagés, entre interactions sociales et temps pour soi, il faut retrouver l’équilibre. Au croisement du design, des sciences et de l’art, nous créons de nouveaux accès à l’intimité.
Que préparez-vous pour le pavillon Future On Stage ?
AG : À côté des formes géodésiques d’Orri, nous dévoilerons notre nouveau fauteuil protecteur : Wrap. Il est composé de structures tubulaires en acier et son textile maintient ses courbes, cylindriques cette fois-ci, dans différentes positions.
Et après ?
AG : Nous souhaitons créer une maison d’édition qui fédère un groupe de designers sensibles à notre démarche d’insuffler du calme et de l’intimité à notre quotidien. Nous allons développer notre approche en travaillant sur d’autres objets que l’assise. Nous réinterprétons en ce moment un objet d'espaces partagés mais il est encore tôt pour en parler plus précisément.
C’est quoi : La vase des ports devient une matière au nuancier mirifique.
Pays : France
L’histoire de la marque : Gwilen c’est du breton, c’est le fleuve la Vilaine dont l’estuaire s’envase depuis la construction d’un barrage. Il y a cinq ans, Yann Santerre, qui a grandi tout près de l’embouchure, effectue des essais de transformation de cette invasive vase. Il a, depuis, développé un procédé sans cuisson qui solidifie ces sédiments afin de les utiliser en construction et en design. Accompagné depuis 2018 par le technopôle Brest Iroise Gwilen, il présente des prototypes au salon du meuble de Milan l’année suivante, crée son entreprise à Brest et dévoile ses premiers objets à la Paris Design Week de 2021. Une lampe, une console et des crédences aux finitions brutes, huilées ou cirées que les pigments naturels teintent dans la masse en un nuancier qui donne envie de toucher. Les intensités de couleurs (allant du vert lichen au bleu céruléen en passant par le rouge corail et le brun tabac) permettent des effets de marbrure ou des dégradés. Ce travail remarquable, utile et beau, est lauréat 2022 des concours Cleantech Open et Crisalide industrie.
L’idée innovante : Valoriser les sédiments marins – une ressource locale et disponible en très grande quantité (il s’en forme 1, 25 m3 chaque seconde) –, en matériau design pour une architecture durable.
Le produit-phare : Les carreaux de 21 teintes dont la naturelle, le marron clair.
Le coup de buzz : Une table serpentine de onze mètres de long pour Frugale à l’hôtel de Coulange (Paris 4e) en 2021, une exposition organisée par Hélène Aguilar du podcast Où est le beau.
En quoi Gwilen est-il révolutionnaire ?
Yann Santerre : C’est la promesse de limiter l’envasement des ports et l’étouffement de la bio diversité tout en créant de nouveaux éléments de construction. Nous avons de quoi faire : il faudrait extraire environ 100 000 mètres cubes de sédiments chaque année pour que l’écosystème retrouve son aspect naturel.
Que préparez-vous pour le pavillon Future On Stage ?
YS : Nous présenterons une nouvelle gamme de carreaux qui raconte leur origine sédimentaire avec des jeux de motifs. Nous exposerons également notre lampe en deux formats, pour laquelle nous cherchons un éditeur. Une table de salon et un bout de canapé viennent d’être produits par un éditeur, il est encore tôt pour le dévoiler, mais ils seront présents sur leur stand au salon. Ils seront visibles sur leur stand à Maison & Objet. Ces partenariats pour du mobilier sur mesure nous permettent d’explorer tout le potentiel du matériau.
Et après ?
YS : Nous entamons un programme en recherche et développement de 18 mois, qui vise d’autres applications pour le bâtiment : des briquettes de façade, des pavés de sol pour l’espace public ou du carrelage. Nous démarrerons la phase de pilote industriel en 2024 afin de substituer cet argile à la terre cuite ou au béton qui nécessitent une cuisson à très haute température et dont la production est polluante.