Or, laiton, albâtre, marbre, galuchat… Les matières précieuses font partie du paysage décoratif depuis toujours. Ce patrimoine brillant s’inscrit dans la modernité grâce à une invention perpétuelle et des interprétations toujours renouvelées.
Ce sont les revêtements muraux en shantung de soie tissé selon les techniques japonaises anciennes perpétuées par la maison Kyoto Izumi. C’est une coiffeuse aux lignes classiques élégamment recouverte d’un galuchat gris foncé dont la douceur apparente contraste avec sa structure en acier, une pièce emblématique du travail du fabricant britannique RV Astley. Ce sont les luminaires comme des bijoux, pendentifs audacieux en albâtre et laiton, de Tonicie’s. Chez Maison&Objet, les matières précieuses sont un fil à suivre. Il se déroule sans ostentation, malgré les qualités et les effets remarquables produits par ces matériaux luxueux.
Oscar Lucien Ono
« Les matières précieuses sont la signature des projets de Maison Numéro 20 », revendique Oscar Lucien Ono. Le fondateur de cette agence d’architecture d’intérieur l’a apposée sur des hôtels et des restaurants parisiens ou encore des résidences privées. Bronze, or adouci, broderies raffinées, paille en marqueterie, laque… Le décorateur, qui termine un nouvel hôtel à Saint-Barth, explique utiliser avant tout ces matériaux singuliers pour « rehausser et cadrer un décor ». Ils interviennent alors sur des plafonds décaissés, des niches, leurs dimensions parfois parcimonieuses. Les panneautages et paravents qu’il affectionne sont des réalisations et des pièces sur-mesure pour lesquels Oscar Lucien Ono collabore avec des artistes et artisans comme le peintre, sculpteur et designer François Mascarello ou la créatrice de papiers peints et décors muraux Solène Eloy. S’il excelle dans l’utilisation de ces matières pour ses aménagements, le décorateur défend aussi l’idée « de générer des échos à leurs motifs ou à leur aspect dans les détails du décor ».
Mobilier, tapis, textiles et objets, les propositions sont éclectiques. Les vases, bols, photophores et bougeoirs de Ooumm sont des points de suspensions luxueux qui peuvent parfaitement remplir cette fonction. Ces créations souvent en marbre, en laiton martelé, diffusent aussi des senteurs rares. La collaboration entre les maisons italiennes Iris Ceramica Group, experte en céramique, et la non moins renommée entreprise Pablo Castelli a donné naissance à une collection irradiante, Seventyonpercent, dont est notamment issu un ensemble miroir et vasque féérique. Il associe céramique, or, laiton et cuir.
Le sycomore, le bois laqué, l’acier patiné, le métal nervuré… Hervé Van der Straeten qui crée aussi des bijoux excelle dans la conception de ces éléments inattendus. Un jeu heureux que l’on retrouve dans la tradition japonaise du kintsugi que Maison Gala s’est appropriée avec beaucoup d’esprit, un trait d’or 24 carats cicatrisant ses porcelaines avec une infinie délicatesse.
Quant aux luminaires du ferronnier d’art Maison Pouenat, qui apprivoisent l’albâtre, ou de l’Anglais Bert Frank, mini architectures de laiton et de marbre blanc de Carrare ou de marquina noir profond, ils diffusent une douce lumière qui les rend doublement précieux.
Tout comme le baby alpaga des tissus, plaids et tapis de Inata, ils démontrent que ces matières sont aussi recherchées pour les sensations qu’elles procurent.
La plasticité, la malléabilité, les possibilités des matières précieuses sont une source de réinvention infinie pour peu que l’on les aborde avec curiosité. Pour Stéphanie Coutas, c’est même l’essence de son travail. Celle qui imagine de très luxueuses résidences privées, des hôtels, des yachts en France et à l’étranger, voit son agence comme un laboratoire d’idées. « On est en permanence à la recherche de nouvelles textures, de nouvelles atmosphères, de nouveaux touchers. Nous travaillons beaucoup les couleurs en monochrome, à partir d'une tonalité de blanc par exemple, explique-t-elle, ce qui implique un travail sur les textures ». Ces effets recherchés avec passion permettent de susciter des contrastes et de sublimer le décor avec des aspects originaux et des sensations surprenantes.
Stéphanie Coutas
« On travaille par exemple des essences de bois avec des vernis grands brillants, on fait des essais de résine ». Elle joue ainsi avec la sélénite, minéral travaillé en marqueterie, apprécie les papiers peints qui s’enrichissent de nacre ou de pierres, explore le raphia, la paille avec des artisans talentueux. Le terrain de jeu semble sans limite pour celle qui s’impose de venir chez Maison&Objet Paris sans objectif ni contraintes, mais l’esprit ouvert, pour trouver de nouvelles matières, précieuses, qui inspireront ses futures créations. Et qui imagine déjà une nouvelle collaboration après avoir découvert sur la dernière édition du salon les créatrices de magiques sphères en verre. Une nouvelle matière à réflexion.